Démocratie

Le Grand Paris

une ambition qui ne date pas d’hier

Le projet de Grand Paris que présente le gouvernement nous fournit l’occasion de revenir en arrière et de retracer l’histoire des rapports toujours complexes que la capitale a entretenus avec sa banlieue.

Malgré les apparences, la banlieue n’est pas un lieu mis au ban de la ville.
Au Moyen âge, ce terme désigne l’étendue des possessions placées sous la juridiction d’un même seigneur (le terme est construit à partir de la « lieue » comme mesure de distance, et du « ban », endroit où l’on peut faire proclamer ces lois).

Ce n’est vraiment qu’à partir de la moitié du siècle dernier que le terme de banlieue est utilisé pour désigner les agglomérations où s’entassent les couches populaires à la périphérie des centres urbains. Le concept de banlieue est directement lié à l’industrialisation qui nécessite un apport important de main-d’œuvre et qui oblige à sortir du cadre des agglomérations existantes pour les loger.

Au cours des siècles précédents, du fait de la structure économique très parcellaire et de l’importance de l’eau dans l’artisanat et pour la circulation des marchandises, les couches populaires sont au centre des villes. À Paris, la Cour des miracles, le Carreau du temple, les halles.
C’est l’industrie qui crée au début du 19e siècle, le besoin d’une main-d’œuvre nouvelle qu’il va falloir loger.

À Paris notamment, on évoque les « fortifs », terme qui veut dire au-delà des fortifications et qui désigne les communes de Belleville, Montmartre, La Chapelle, qui sont alors des villages où se concentre cette population ouvrière.

C’est le préfet Haussmann qui en 1859 intègre ces communes à Paris en y réalisant des travaux qui assurent la continuité de l’agglomération.
Un siècle plus tard, on peut dire que c’est toujours cette même politique que l’on retrouve avec les travaux de Paul Delouvrier à la Libération et la création des villes nouvelles, puis avec le découpage du département de la Seine en six entités départementales distinctes ; à cette différence près que là il ne s’agit plus de concentrer les pouvoirs mais au contraire de décentraliser et de rapprocher les centres de décision au plus près des citoyens.
Le rapport plus ou moins harmonieux entre Paris et sa banlieue s’inverse au début des années 80, avec l’arrivée du chômage de masse.
D’une part la banlieue ne cesse de grossir, notamment par l’afflux migratoire, dû en partie à la politique du regroupement familial, et au chômage qui entraîne la désertification des campagnes au profit de la ville, d’autre part par le ralentissement de l’industrialisation et les délocalisations créant un chômage de masse qui ne permet plus à la majorité des habitants de la banlieue de s’intégrer socialement et économiquement dans cet ensemble urbain que forme le capital et les communes périphériques.
Il y a fort à craindre que dans le contexte de crise économique que nous connaissons le projet de Grand Paris ne soit qu’une tentative de reprise en main par la droite des pouvoirs locaux qui lui échappaient et que, toutes proportions gardées, Christian Blanc ne soit pas le Baron Hausman !