Châteaubriant

En arrivant à Châteaubriant une surprise nous attendait

Alors que nous nous apprêtions à pénétrer dans la carrière, un cordon de gendarmes vint nous barrer la route, obligeant tout porteur de badge, qu’il y fût inscrit CGT ou PCF à le retirer avant d’accéder au site de la commémoration.
L’image était tellement forte qu’un instant je crus à une mise en scène pour faire revivre les heures les plus noires de la police française sous l’occupation, mais non ce n’était pas du théâtre.
À la provocation policière répondit la colère des manifestants et nombreux furent ceux qui vertement rappelèrent aux gendarmes le rôle peu glorieux qu’on leur avait fait jouer hier et qu’on leur faisait jouer encore aujourd’hui.
Le préfet debout à quelques mètres du barrage fut interpellé par Marie-George Buffet en sa qualité d’ancien ministre sur le sens de cette provocation. Avec un grand courage le préfet répondit qu’il venait d’être nommé et qu’il ignorait le détail des mesures de sécurité !
Pour bien comprendre, il faut savoir que la commémoration des fusillés de Châteaubriant commence par une cérémonie officielle ou, en plus du préfet, sont représentées les autorités militaires. De ce fait, il y a déjà quelques années l’armée nous avait fait savoir qu’il n’était pas possible d’organiser une cérémonie avec salut au drapeau en présence de drapeaux rouges et que seul le drapeau français devait être brandi lors de cette manifestation. Dont acte, si la reconnaissance de l’acte de résistance de nos camarades était à ce prix, nous pouvions l’accepter et les drapeaux rouges des différentes organisations ne réapparaissaient qu’a la fin de l’hommage militaire.
Mais entre limiter le temps de présence des drapeaux et interdire le port de badges, il y a un pas qui n’aurait jamais dû être franchi.
D’autant plus que la mesure était inefficace puisque, le barrage passé, tous les camarades ressortaient le badge ôté quelques secondes plus tôt et qu’arrivé dans la carrière chacun arborait le sien comme si de rien n’était.
Il était donc évident que cette opération n’avait qu’un but : montrer que le pouvoir n’entendait rien lâcher de sa tentative de récupération de Guy Môquet et de falsification du sens de la Résistance.
Preuve s’il en était besoin que nous sommes bien là au cœur du combat de classe.
La meilleure réponse que nous puissions fournir, c’est d’être encore plus nombreux
l’année prochaine.

Jacques Aubert