Inquiétantes similitudes

La presse du 15 février dernier s’est fait l’écho d’une manifestation, peu commune depuis que l’on pensait avoir enfin atteint ce souhait exprimé mondialement depuis 72 ans, éradiquer à jamais « la Bête immonde » qu’est le fascisme.

Ce vœu pieux est largement compromis au regard des réalités politiques d’un monde où règnent en maîtres absolus les tenants du capital financier, ceux-là même qui financèrent en connaissance de cause les horreurs fascistes et nazi de la 2e Guerre Mondiale.

Or les faits sont là ! Partout dans le monde et notamment dans de nombreux pays européens, dont la France, ont voit ressurgir avec « pignon sur rue » une extrême droite qui ne dit pas son nom mais nourrit des desseins tout aussi dangereux et destructeurs pour l’humanité que le furent leurs inspirateurs.
Toute l’histoire de la naissance du fascisme en Italie, en Allemagne, en Europe, nous apprend qu’entre 1919, (première expression criminelle de Mussolini) et 1940 où commencèrent cinq années fort justement appelées en France les années noires de l’Occupation, il aura fallu 21 ans dans l’indifférence et parfois le soutien des différents gouvernements, pour qu’ils fassent de l’Europe un champ de ruines et de morts.

De nos jours, plus de 72 ans après, cette histoire de la France torturée par son propre gouvernement complice des occupants nazis, n’a pas encore franchi les murs des établissements scolaires autrement qu’édulcorée, alors que la 2e Guerre Mondiale est à l’ordre du jour des programmes d’enseignement.
La Résistance dont on connaît l’existence comme un fait d’armes du général de Gaulle se limite à un épisode, certes glorieux, mais faisant le silence sur ce que cela impliquait réellement de souffrances et de crimes contre cette armée de l’ombre issue du peuple français et combattant pour la liberté sur le sol national.
Or il est évident que la jeunesse est curieuse à juste titre de sa propre histoire, les rencontres que j’ai pu avoir avec des classes de 1re de lycées à la demande des professeurs d’histoire se sont toujours montrées riches en questions et en étonnement devant ce que l’on peut appeler une ignorance programmée.

Ainsi, j’ai eu souvent l’occasion de relater une manifestation de première révolte organisée par notre groupe de jeunes résistants de Toulouse, pour la pluparts fils de syndicalistes CGT, entrés dans la Résistance dès l’annonce de la trahison de Laval et Pétain et répondant à l’appel à résister du général de Gaulle le 18 juin 1940 et de Charles Tillon, député communiste, le 17 juin 1940.

Dès que fut signé son mauvais coup, le traître Pétain se présenta en « sauveur suprême » : « Je fais don de ma personne à la France » que l’on pourrait traduire par « Je fais don de la France à Hitler et à sa police criminelle la Gestapo ».

Il décida un jour de novembre 1940 de venir parader dans les principales rues de la ville en voiture découverte.

Immédiatement se mit en place à l’initiative de l’un de nôtres particulièrement ingénieux une « opération de protestation ». Il s’agissait de faire tomber, venant des toits de l’artère principale, des milliers de tracts stigmatisant le maréchal traître et ses complices gouvernementaux tortionnaires de la nation. Un simple appareil de contrepoids composé d’une boite pleine d’eau s’écoulant en goutte à goutte devait libérer à une heure calculée le paquet de tracts mis en balance.
Le mécanisme a fonctionné à la perfection et la voiture découverte copieusement couverte de nos appel à la révolte, à la grande stupéfaction et la colère des sbires de la Gestapo allemande et française qui foncèrent sur les toits pour ne trouver qu’une boîte de conserve vide, le tout ayant été déposé pendant la nuit.
Nous étions dispersés dans la foule pour juger de l’effet produit et quel fut notre étonnement d’y voir en groupes compacts une multitude d’enfants munis d’un petit drapeau bleu-blanc-rouge et criant « Vive Pétain ! ». Il s’agissait tout simplement de l’obligation faite aux directeurs d’établissements scolaires d’assurer avec leurs élèves la liesse qui risquait d’être insuffisante malgré la propagande à outrance qui couvrait les murs de la ville vantant les vertus du nazisme soutenu par le gouvernement français.

Les jeunes d’aujourd’hui sont unanimement outrés quand je signale cet épisode parmi tant d’autres beaucoup plus dramatiques des conditions d’une occupation violente, dégradante pour les familles dont on utilisait les enfants.

Alors que doit-on penser de l’initiative prise par le Maire UMP de Lavaur dans le Tarn en organisant un scenario analogue dans sa ville où les groupes scolaires furent requis avec les enseignants, tous munis d’un petit drapeau bleu-blanc-rouge, pour aller crier « Vive Sarkozy ! » sur le passage de la voiture découverte de son maître à penser politique ?
Drôle de similitude dans la même région !

Certes aujourd’hui il y a une protestation des associations de parents d’élèves et une dénonciation dans la presse stigmatisant des pratiques de triste mémoire. Il n’en reste pas moins qu’il y a lieu de s’étonner qu’un élu UMP puise son inspiration auprès des agissements d’une extrême droite fasciste que l’on dit éradiquée.

Le fait n’est pas isolé, puisque la campagne de Sarkozy pour les Présidentielles a offert un spectacle de même nature à Villepinte où l’UMP a financé (sur quel budget ?) un grand nombre de TGV sillonnant la France pour réunir ses troupes, enfants compris, tous armés d’un petit drapeau bleu-blanc-rouge et criant à gorge déployée « Vive Sarkozy ! » avec une ardeur telle que « le candidat président déifié » devait saisir les rares zones de silence pour crier sa haine contre le syndicalisme et l’insupportable drapeau rouge de la CGT.
Les années passent mais les pratiques restent les mêmes.

Certes le « dieu UMP » a dû regagner ses foyers par la volonté électorale d’un peuple écœuré de sa politique farouchement antisociale, mais les troupes sont toujours là, se mobilisant pour la revanche et s’apprêtant à réaliser toutes les alliances les plus libérales où l’on retrouvera sans doute le parti des criminels d’hier ainsi que le MEDEF pour dresser « le mur de l’argent » dès qu’il s’agira selon les engagements pris par le président de la République, de prendre les mesures correspondant à l’amélioration indispensables des conditions économiques et sociales.

Le folklore du Front national féminisée et rompu aux techniques du scénario mensonger propre à faire oublier son état de châtelaine milliardaire, va encore occuper largement les médias avec « l’amour immodéré » que porte son mouvement au sort des ouvriers.

Il est devenu impérieux, à l’heure où la France a montré sa volonté d’une autre politique résolument sociale et démocratique, de laminer la montée inquiétante de l’extrême droite.

Denise Foucard